Déc 152010
Voilà un écrivain finnois qui nous parle de l’Estonie. Elle nous raconte, par petites touches, des souffrances épouvantables sur fond de bouleversements politiques qu’a subis ce pays convoité par ses puissants voisins.
Comme chacun sait, l’Estonie, le plus septentrional des états baltes, a été maintenu sous domination suédoise au XVIIè siècle avant de passer sous domination russe au XVIIIè. En 1918, après une brève occupation allemande, une guerre de libération permet d’arracher l’indépendance à la Russie bolchevique. La République d’Estonie est indépendante de 1920 à 1940.
A la suite du pacte germano-soviétique, l’Estonie est incorporée à l’URSS ce qui lui apporte une vague de déportation en Sibérie.
En 1941, l’offensive allemande entraîne l’invasion du pays et l’extermination de sa population juive. L’armée rouge revient en 1944, ce qui permet la reconstitution de la RSS d’Estonie avec une vaste immigration russe, la collectivisation des terres et une nouvelle vague de déportation en Sibérie.
Après la chute du mur de Berlin, l’Estonie redevient un état souverain, adhère à l’Union européenne et va bientôt adopter l’euro.
Toutefois cette happy end n’apporte pas que du bonheur. Comme en Russie, dans une société qui s’écroule, des mafias et des malfaisants de tout poil prospèrent et les plus faibles sont broyés. Le livre s’ouvre avec le réveil d’une pauvre vieille terrorisée dans sa maison en lisière de forêt. Les lambeaux de ce qui fût sa ferme sont convoités par de mauvais garçons qui la menacent. Elle va néanmoins trouver la force d’aller voir de près un ballot qui est apparu dans son jardin et qui se révèle être une jeune fille bien amochée.
Par des allers retours, de chapitre en chapitre, entre 1936 et 1992, entre l’Estonie et la Sibérie, Sofi Oksanen découvre les secrets de famille cachés dans cette ferme qui fût prospère. Deux soeurs y ont aimé le même homme ce qui a donné lieu à des trahisons les plus abominables amplifiées par les déchirements de la société.
De l’effondrement du système soviétique à la prostitution , les échos de près d’un siècle de malheurs passent dans cette cuisine où l’on prépare des conserves de légumes et des fruits du jardin.
Ce livre avec une écriture sans effet tient en haleine jusqu’à la dernière page.
PURGE (PUHDISTUS) de Sofi Oksanen. Traduit du finnois par Sébastien Cagnoli. Stock, 408 p., 21,50 €. Prix Femina du livre étranger.