Nov 272012
 

Le Retour de Harold Pinter
mise en scène Luc Bondy avec Bruno Ganz, Louis Garrel, Pascal Greggory, Jérôme Kircher, Micha Lescot, Emmanuelle Seigner

Pièce pour le moins dérangeante.
Dans une maison du West End, à Londres dans les années 1960. Il y a le père, Max, veuf et ancien boucher ; deux de ses fils – Joey, le boxeur, et Lenny le souteneur – ; et puis Sam, le frère de Max, célibataire et chauffeur de taxi devenu chauffeur à la journée.
Un milieu d’hommes, frustes, brutaux, aigris. Les rapports entre eux sont violents. Les conflits éclatent  pour un rien.
Il suffit que le troisième fils, Teddy, enseignant de philosophie aux États-Unis, débarque une nuit, à l’improviste, pour que tout bascule : il est accompagné de Ruth, son épouse, mère de ses trois enfants. Dans cet univers clos qui n’a plus connu de femme depuis tant d’années, cette intrusion fait l’effet d’un électrochoc.
Ruth va-t’elle devenir leur victime plus ou moins consentante ou bien est-ce elle qui les mène par le bout du nez ou plutôt par leurs désirs ?

L’originalité de Pinter c’est qu’il fait entendre les non-dits, les paroles refoulées. Il met en scène les fantasmes.
Lorsque les hommes découvrent la présence de Ruth qui apparaît le matin en déshabillé, le père Max l’accueille par une bordée d’injures en la traitant de putain. Il s’agit évidemment des paroles qui jaillissent dans sa tête du fond de sa frustration. Celles qu’il prononce vraiment ce sont celles que l’on va entendre quelques minutes plus tard où il se fait charmeur et accueillant.

La pièce se déroule entièrement sous ce double registre et dans cette ambiguïtés.
Et lorsqu’à la fin, Ruth laissera partir son mari vers les Etats-Unis retrouver leurs enfants tandis qu’elle reste au service des besoins sexuels du quatuor, dans quel registre se trouve-t-on ? Divagations de Max ou de ses fils ou chimère de Ruth elle-même dont la dernière parole à son mari est : « Teddy, ne deviens pas un étranger » comme pour ne pas se couper complètement de la réalité ?

Autour de Bruno Ganz qui joue de son accent, la distribution est royale : Pascal Greggory, savoureux et méconnaissable et Emmanuelle Seigner, qui fait la femme fatale venimeuse.
L’impression de malaise qui prévaut à la fin tient-elle à la mise en scène ou à la pièce elle même ?

La pièce est entrée au répertoire de la Comédie-Française en 2000, dans une mise en scène de Catherine Hiegel. Muriel Mayette jouait la maléfique Ruth. On aurait raté ça ?

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 Posted by at 17 h 54 min

  2 Responses to “Le Retour”

  1. Non, on n’a pas manqué ça. Je suis presque sûr désormais que nous l’avions vu alors. Cette petite archive de l’INA m’en convainc un peu plus encore : http://ios.mobapp.ina.fr/art-et-culture/arts-du-spectacle/video/CAB00063788/le-retour-harold-pinter-a-la-comedie-francaise.fr.html

    Non ?

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