Oct 082012
LE ROI DU BOIS
« Opéra parlé » d’après le texte de Pierre Michon sur une musique de Michèle Reverdy
Mise en scène Sandrine Anglade
Avec : Jacques Bonnaffé / Le quatuor Varèse / Un enfant chanteur
Théâtre 71 – Malakoff
On retient d’abord de ce spectacle un texte magnifique de Pierre Michon interprété avec force par Jacques Bonnaffé . Une langue superbe, précise et poétique à la fois que le comédien savoure avec gourmandise et nous livre lentement,mot à mot pour nous permettre de les apprécier sans en perdre aucun.
Il donne ce texte en évoluant sur un tapis de feuilles mortes à travèrs des voiles qui montent et s’affalent. Le tout donne une impression de sous bois avec une lumière brune qui diffuse entre ces voiles.
Bonnaffé résume l’action dans un entretien : » un garçon de douze ans, de la plus basse extraction – il garde les cochons dans les bois – voit pour la première fois les apparats, la richesse, mais aussi les dessous du raffinement et de la préciosité : tandis qu’il épie des peintres exerçant leur art dans la nature, il voit une femme descendre d’un carrosse pour aller pisser dans le fossé. A la porte du carrosse, un homme se moque d’elle très gaillardement. »
Ce gamin est litéralement saisi par cette vision qui marquera toute sa vie. Toutes ces dentelles qui se soulèvent pour révéler une chair si blanche et si délicate et se livrer à une action si animale, cela éveille en lui le désir d’approcher plus souvent ces merveilles et ces mystères. Mais cette aspiration échoue et le texte baigne dans une profonde amertume pour se conclure dans cette phrase diabolique : « Maudissez le monde, il vous le rend bien. »
Bonnaffé raconte cette histoire aidé par un enfant qui apporte un peu de douceur à cette amertume et surtout par un quatuor dont la partition contribue aux teintes feuille morte qui caractérisent ce – très beau – spectacle.
Merci de m’avoir convaincue de faire le » voyage » jusqu’à Malakoff. Bonaffé a sublimé le lyrisme des phrases de Pierre Michon . Il semble savourer cette langue merveilleuse comme une friandise et je savourais avec lui. La musique du quatuor à cordes accopagne délicatement sans prendre trop de place et le petit gamin à la voix angélique s’intègre parfaitement à cette sobre mise en scène
Un pur moment de bonheur !