Temps de Wajdi Mouawad
Le Théâtre national de Chaillot présente Temps texte et mise en scène Wajdi Mouawad. Les passionnés – nous sommes nombreux – se retrouvent vite en pays de connaissance. Cette capacité des grands créateurs de théâtre à faire naître une ambiance, un climat qui n’appartient qu’à eux avec quelques accessoires et une parole bien spécifique.
Ici quelques toiles blanches en fond de scène et … du vent. Le vent glacé et assourdissant. Nous sommes à Fermont, une ville minière à la frontière du Labrador. En hiver, les températures peuvent, paraît-il, descendre jusqu’à – 60°C et les personnages sont couverts d’épaisses pelisses de fourrure.
Temps est moins autobiographique que le cycle du « Sang des promesses » ou que « Seuls« . Il est néanmoins question de la difficile relation au père, d’apocalypse qui menace, de la difficulté de communiquer, bref c’est tout Mouawad avec une construction baroque, tourmentée, une langue compliquée et des symboles nombreux que l’on a du mal à décoder.
Il est question du meurtre d’un père incestueux, Napier de la Forge, ingénieur et poète qui a fondé cette ville il y a longtemps. La mère s’est jadis suicidée par le feu qui a embrasé la forêt. Depuis, des hordes de rats se répandent dans les rues.
Noëlla de la Forge, la fille victime explique :
« Ma mère au corps calciné, jamais retrouvé, parle! Elle s’adresse à la mémoire de mon père, à la mémoire de cette ville. Une injustice est restée impunie. C’est cela les rats! La horde!. »
Elle en est devenue sourde. Il faut donc le truchement d’une interprète en langage des signes. Lors du drame, les jeunes frères jumeaux – forcément jumeaux! – ont été dispersés.
Noëlla les fait revenir pour ce dénouement. L’un d’eux revient de Vladivostok, il ne parle que russe ; d’où une autre interprète. On a bien compris la difficulté de communiquer.
Tout cela est lourd, confus. On a du mal à y adhérer, à rentrer dans ce processus qui semble écrit sans que les personnages n’agissent vraiment mais semblent au contraire se laisser porter par une destinée.
On a aussi des poupées russes, du tir à l’arc … c’est trop, on décroche.
Les comédiens ne sont pas en cause, vibrants, toniques. La construction du spectacle tout en mouvement fait beaucoup appel à la musique, mais tout cela n’est pas assez convaincant.
Déception!